Il y a quelques jours, mon beau père m’a confié sa hache de mineur pour que je la répare. Il l’utilise pour se tailler des buchettes et pour plein de choses. C’est un peu une hachette à tout faire au final et celle-ci est cassée.
Une hache de mineur quesako ?
Mon beau père m’a précisé, je cite :
C’est une hache de mineur des houillères du Nord, qui vient de ma famille et elle a été utilisée dans les mines de Bruay en Artois
En quoi les haches du NOOOORD sont spécifique ? Aucune idée. Peut être qu’elles aiment les frites.
En tout cas, les haches de mineurs, ou hache de boiseurs de mines, étaient utilisées pour la réalisation des étayages. Elles étaient portées à la ceinture, accrochées par un trou réalisé dans le fer. Ces haches étaient fabriquées le plus souvent sur place, au plus simple comme pour celle-ci : le fer plat est riveté à une boucle dans laquelle le manche est passé en force. Traditionnellement, les fers étaient frappés avec l’identification du titulaire, mais ce n’est malheureusement pas le cas ici.
Je tiens à préciser que l’âne que je suis n’a pas fait de photos avant d’attaquer la restauration. Je m’en veux vraiment, je n’ai pas encore le réflexe.
En tout cas, lorsque je l’ai récupérée, les 5 rivets étaient cassés et étaient en partie manquants. Deux d’entre eux avaient eu le droit à des points de soudure à l’arc, surement pour tenter une réparation. Le fer ne tenait donc plus que par trois bouts de rivets cassés et le manche flottait complètement. De plus la boucle était déformée et ne portait plus sur le fer en plus de ne plus être alignée sur les trous de ce dernier.
Le manche ayant été remplacé il y a peu, il était quand à lui en excellent état.
Lorsque j’ai commencé à réfléchir avec mon beau père sur comment réparer tout ça, il m’a dit « un peu de soudure et ce sera bon, te prends pas la tête« .
Bon … je vais faire mieux que ça. Parce que bon, elle est bien belle cette hache de mineur et elle mérite mieux que ça.
Le travail de ferronnerie
Le travail de ferronnerie s’est fait en trois étapes :
- virer les anciens rivets
- redresser ce qui a besoin de l’être
- re-riveter
Je tiens à préciser que je n’ai pas de forge chez moi. Tout s’est donc fait au marteau et à l’étau. Ce dernier étant de taille correcte et possédant une partie conçue pour jouer le rôle d’enclume, au final ça s’est bien passé. Le fait que l’acier soit de piètre qualité a également bien aidé. En effet, en dehors du tranchant du fer qui a été trempé, le reste est tout juste bon à ferrer les lapins. En temps normal, vu l’épaisseur de la boucle (env 7mm), il aurait été très difficile de la redresser sans la chauffer.
Les rivets
La plupart des rivets ne m’ont pas posés soucis, il a suffit de les frapper par l’arrière pour les faire sortir. Par contre ceux ayant été soudés ont eu besoin d’être percés afin de pouvoir les évacuer et faire la place à leurs successeurs. Toute la difficulté a été de réussir à fixer la boucle en position dans l’étau afin de résister aux assauts du marteau. A noter d’ailleurs que la relative souplesse de mon établi ne m’a pas aidé : j’aurai préféré avoir un support beaucoup plus rigide et qui n’amortit pas les coups.
Les nouveaux rivets sont découpés dans de la barre acier de 10mm en provenance du magasin de bricolage du coin. J’ai eu la chance d’avoir pile le bon diamètre en stock. A noter que le fait que ce soit un acier très mou m’a permis de les riveter à froid et non à chaud comme cela se fait normalement. Les nouveaux rivets sont simplement coupés à la meuleuse et chanfreinés pour être rentrés en force dans la boucle et le fer.
L’assemblage de la tête
Avant d’enfiler les rivets et de se pourrir les bras à frapper comme un forcené, il a fallu tout réaligner. En effet, la boucle n’était plus alignée avec le fer et a donc du être martyrisée un peu. Le tout a été de placer la boucle sur l’étau et de frapper au marteau pour compenser les déformations. Ce point a été celui qui m’inquiétait le plus, même si au final il s’est très bien déroulé et la boucle a retrouvé sa forme d’origine sans trop de difficulté.
Le rivetage s’est fait assez simplement : rentrer le rivet en force dans le fer jusqu’à qu’il ne dépasse plus que de quelques millimètres. Le mettre en contact avec l’étau et le marteler afin de lui faire épouser son emplacement. Retourner le tout, raccourcir le rivet à la meuleuse puis le marteler pour prendre en étau la boucle et le fer. Passer au rivet suivant. Et avoir mal au bras.
Après avoir mis les 5 rivets en place, j’avais vraiment mal au bras. Il faut dire que j’y ai mis de l’énergie afin de former une tête suffisamment aplatie pour être assez solide. L’avantage d’avoir forgé les rivets à froid est que cela leur donne une résistance supplémentaire par rapport à une forge à chaud. Je ne saurais pas la quantifier, mais ça me conforte dans l’idée que je n’ai pas passé une après midi à taper avec un marteau comme un sourd pour rien.
La finition
Pour nettoyer la pièce et masquer les coups de marteau ratés, j’ai fini avec un coup de meuleuse équipée d’un disque à lamelle. Le problème est que du coup la patine a disparu. Vu l’age de cette hache de mineur, je trouvais dommage de lui donner un aspect brillant ou peint. J’ai regardé pas mal sur le net afin de trouver le moyen de recréer cette patine. Etant donné qu’elle provient d’un mélange de rouille et de graisse durcie par le temps, je me suis dit que le plus simple pour retrouver cet aspect était de faire rouiller puis de la badigeonner de Rustol, suivi d’une couche de verni.
N’ayant pas envie d’attendre quelques semaines pour que de la rouille se forme, j’ai accéléré un peu le mouvement. J’ai donc appliqué la méthode suivante :
- Dans un seau, préparer de l’eau chaude et y mélanger du gros sel.
- Plonger la hache dans l’eau quelques minutes le temps qu’elle se réchauffe.
- Laisser reposer la hache à l’air libre jusqu’à que l’eau se soit évaporée.
- Replonger dans l’eau et recommencer jusqu’à avoir une couche de rouille suffisante.
Le processus peut être accéléré en séchant au sèche cheveux.
Le rustol appliqué sur la rouille prend une belle couleur marron-noire assez proche de la patine d’origine. Afin de le protéger, j’ai ensuite appliqué un couche de vernis sur le tout. Je sais que vu l’utilisation qui est faite de la hache, c’est un peu dommage. Mais je voulais quand même lui donner une belle couleur. Et avec un peu de chance cela convaincra mon beau père de l’encadrer au lieu de l’utiliser.
L’assemblage final
Avant de fixer le manche, j’ai poncé celui-ci afin de le lisser et l’ai huilé. L’opération a fait ressortir le grain et lui a donné une patine aussi jolie qu’imprévue. Le manche est ensuite simplement rentré en force dans la boucle. J’avais prévu d’ajouter un coin dans le haut du manche pour le maintenir en position mais au vu du serrage ce n’est pas nécessaire. Pour l’instant en tout cas, ça suffit.
Il ne reste plus qu’à rendre la hache à son propriétaire. Sauf si je la garde pour moi et que je lui offre une autre hache en remplacement … j’hésite.
Bonjour j’ai la même hachette ,je cherche un manche qui peut me dire ,lequel acheter svp
merci
Bonjour,
Le manche a été fait sur mesure par un particulier. De manière générale, ce genre de hache est fait sur mesure et je ne suis pas sur qu’il existe un manche « standard » fait pour
Désolé, je n’avais pas eu la notification 🙁
Le problème est de savoir quel est l’acier utilisé. Tous ne se trempent pas.
Ceci dit c’est toujours possible d’essayer ça ne coûte rien
Bonjour,
Félicitations beau résultat.
En fait, je dispose du même outil que je suis entrain de restaurer.
Par contre la mienne n’a pas de trou pour l’attache, et la trempe est de très mauvaise qualité, le tranchant s’émousse très facilement. Crois tu qu’il serait raisonnable de retremper ou alors de la laisser en l’état?
Bonne journée
patrick
Mon beau père m’a finalement proposé de la garder, à condition que je l’encadre … et après réflexion j’ai refusé, notamment à cause du manque de place.
Aujourd’hui elle est donc repartie à couper du bois pour quelques années (je l’espère en tout cas)